Les smicards, les bas salaires, les chômeurs et les rmistes mesurent mal les dilemmes dont sont victimes les patrons guidés par l'Evangile. L'hebdomadaire Courrier Cadres du 18 décembre 2003 dévoile les tourments auxquels ils sont livrés. Comment justifier les écarts de salaires ? Comment licencier sans avoir mauvaise conscience ? Quelles relations entretenir avec ses subordonnés ?
À la première question, Henri de Castries, PDG d'AXA, répond sans honte que l'écart des salaires observé dans le géant de l'assurance (de 24000 à 20 millions d'euros annuels) trouve sa justification dans l'Evangile : "à l'image de la parabole, les talents se paient".[/b] Affirmer que
l'échelle des salaires traduit réellement une hiérarchie des compétences est une insulte. Compétents les patrons surpayés dont les sociétés se signalent par des déficits sans fond ? Incompétents les smicards et les bas salaires du simple fait de leur faible rémunération ?
Le même sicaire poursuit sa croisade antisociale, autant que très chrétienne, en justifiant les délocalisations à l'étranger, pourtant génératrices de chômage en France, par l'aide aux pays en voie de développement : "Les entreprises qui délocalisent contribuent au développement des pays émergents." Les délocalisations sont la version moderne de la charité chrétienne... Bien que tous les patrons chrétiens ne partagent pas l'évangélisation à la hussarde du PDG d'AXA, leurs convictions chrétiennes se limitent à se déclarer peinés par les licenciements sans pouvoir se prévaloir de quelque action positive que ce soit. Le christianisme n'est là que pour apaiser les consciences et n'a jamais eu le progrès ni la justice pour ambition.
Quant aux relations humaines, les chefs d'entreprises disposent, depuis deux ans, d'un nouveau quartier général en plein cœur du quartier de La Défense à Paris : l'église Notre Dame de la Pentecôte reçoit avec compassion leurs gémissements de patrons affligés par le martyre social. Et on apprend avec stupeur l'intrusion d'une nouvelle mode dans les techniques de gestion du personnel avec le recours au coaching spirituel. Pourquoi pas. La morphopsychologie (relation supposée entre la psychologie du sujet et les traits morphologiques de son visage, plus c'est idiot, mieux ça marche) et l'astrologie (sélection en fonction du signe zodiacal, idem) ont, depuis longtemps et en parfaite illégalité, investi les méthodes de recrutement.
