L’Afrique-du-Sud devance Madagascar
[16 novembre 2006]
Les letchis se font désirer
Les premiers letchis (on prononce aussi litchis) sont arrivés la semaine dernière en Europe. Et ils proviennent d’Afrique du sud. Un anachronisme total dans la production de ce fruit saisonnier puisque les vergers sud-africains sont traditionnellement les derniers à arriver à maturité, en général pas avant le mois de janvier, bien après la récolte malgache qui représente l’essentiel de l’offre sur le marché européen. Le dérèglement climatique explique cette anomalie. Profitant de la douceur exceptionnelle du climat, les Sud-africains sont déjà dans la phase de commercialisation tandis que les Malgaches n’ont toujours pas commencé la récolte. Faut-il s’en plaindre ? Pas forcément rassure l’importateur français Cédric Diallo. Le litchi sud-africain proposé cette semaine sur les étals des primeurs sera sans doute de très bonne qualité mais à un prix prohibitif en raison du coût du transport qui se fait par avion. Et puis, lorsque le premier bateau en provenance de Madagascar arrivera à Marseille, l’offre sud-africaine sera déjà écoulée, elle ne concurrencera donc pas le fruit malgache. Reste à savoir si les litchis malgaches seront disponibles pour les fêtes de Noël : avec une campagne officielle qui démarre au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle, c’est-à-dire le 4 décembre, le premier bateau n’arrivera pas avant le 18 dans le port phocéen, un délai bien court pour que la gourmandise parvienne à temps dans la corbeille de Noël. Les caprices de la météo sont loin d’être les seuls soucis de Madagascar : le déclin de la production et les exigences sanitaires des pays importateurs sont encore plus préoccupants. En ce qui concerne les volumes, il faut savoir qu’ils ont augmenté de façon exponentielle au cours de ces cinq dernières années, les quantités exportées sont passées de 10 000 à 23 000 tonnes. Dans ce pays où la production relève encore de l’artisanat, les paysans qui ne comptaient que sur leurs cultures vivrières ont rapidement compris l’intérêt d’augmenter leur récolte pour se procurer un peu d’argent frais. Un système visiblement à bout de souffle. C’est aussi un système qui trouve ses limites quand les clients deviennent plus délicats. Depuis le 1er janvier, l’Allemagne, le plus gros débouché du litchi de Madagascar, soumet le fruit à des normes sanitaires pointilleuses, la norme dite Eurep-gap qui exige une traçabilité totale hors d’atteinte pour une production reposant sur la cueillette. Jusqu’à maintenant les exportateurs profitaient au maximum de leur position géographique et du climat qui conféraient à Madagascar un statut de monopole à cette période de l’année, mais dérèglement climatique plus régulations européennes obligent, il leur faudra investir pour rester un fournisseur de premier choix.
JIR
